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L'ITIE est-elle efficace au Kirghizistan ?

Certaines choses ne changent jamais : l'or, un signe historique de pouvoir et de richesse, fait l'objet de toutes les convoitises depuis des siècles et a parfois été au centre de conflits. À l'instar du Dieu romain à deux visages Janus, l'or est à une source de prospérité et de conflits. Le Kirghizistan en est l'exemple parfait :

Notre pays n'est pas connu pour être assis sur une grande quantité de ressources naturelles, mais la mine d'or de Kumtor est une des plus grandes d'Asie centrale. En 2012, les taxes et autres paiements dus au gouvernement ont dépassé 300 millions de dollars US. En 2012, Kumtor représentait 5,5 % du PIB; soit – 18,9 % de la production industrielle totale [1]. Cependant, le Kirghizistan a récemment été le témoin de plusieurs litiges et contestations contre Centerra Gold Inc (un actionnaire canadien de Kumtor). Cela représente une menace potentielle vis à vis des investissements actuels et futurs dans ce pays.

Le conflit le plus important autour des mines a lieu en ce moment – les conditions de contrat entérinées en 1991 entre le gouvernement du Kirghizistan et Centerra Gold Inc ont été renégociées plusieurs fois.  Le problème de la renégociation des conditions de contrat refait surface à chaque changement de gouvernement.

Cette séquence perpétuelle de protestation a exacerbé les discussions autour de Kumtor et de l'entreprise. L'entreprise a souvent été décrite comme un 'outsider' ayant peu d'intérêt pour l'environnement. Cependant, cette animosité exprimée contre une entreprise en particulier ne crée pas un climat d'investissements stable, indispensable pour attirer les investissements étrangers dans ce qui pourrait devenir le prochain Kumtor.

Transparence de l'industrie minière du Kirghizistan ?

Dans le même temps, le Kirghizistan s'est engagé à suivre les bonnes pratiques internationales en termes de transparence dans le secteur minier, à savoir l'ITIE. Le pays met en œuvre l'ITIE depuis presque une décennie maintenant et a publié 8 rapports. Il a même été désigné pays Conforme à la Norme ITIE. Mais que cela signifie-t-il pour les habitants du pays ? Et y a-t-il eu des progrès depuis 2011, lorsque le pays a été reconnu comme pays Conforme ? 

Il n'y a toujours pas de bonnes réponses à cette question. Mais l'ITIE peut permettre d'avoir une discussion honnête et approfondie sur la manière dont le Kirghizistan pourrait gérer ses ressources naturelles. Ce n'est pas encore le cas, mais il y a des lueurs d'espoir. Par exemple, selon le rapport ITIE de 2011, Kumtor Gold Company était la seule entreprise à avoir effectué des paiements supplémentaires (environ 10 millions de dollars US) pour construire et subventionner les écoles du pays. Des informations objectives sur le degré de contribution des entreprises à notre société sont nécessaires pour avoir un débat éclairé sur la manière dont nous devons gérer nos ressources. Jusqu'à aujourd'hui, ces informations n'ont pas fait l'objet de rapports et de discussion à grande échelle.

Il faudrait pouvoir tracer les paiements faits au gouvernement (et pas seulement dans la république du Kirghizistan), ce qui pourrait apporter des réponses à de nombreuses questions soulevées par la population locale.

Que faut-il faire ?

Les décideurs politiques doivent se réunir autour d'une table en compagnie des représentants des compagnies minières et les citoyens, et se demander quel est l'intérêt de l'ITIE si personne ne connaît la contribution du secteur minier dans le pays.

En 2013, le Conseil d'administration international de l'ITIE s'est mis d'accord sur une nouvelle version de la Norme, permettant aux pays de définir leurs propres priorités. La Norme ITIE au Kirghizistan devrait profiter de cette opportunité pour fournir des informations objectives si nécessaires et ainsi alimenter la discussion complexe entourant la mine de Kumtor pour envisager ce que nous pouvons faire pour créer le prochain Kumtor.

 

Bermet Tursunkulova est Vice-Présidente, Responsable des affaires académiques à l'Université américaine d'Asie centrale (American University of Central Asia).