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Le Printemps arabe représente une formidable opportunité pour l'ITIE

Le Printemps arabe – devenu été – représente une formidable opportunité pour l'ITIE et la transparence de façon plus générale dans la région. En Égypte et en Tunisie, où j'ai passé le plus clair de la première moitié de l'année, l'appel à la fin de la corruption caractérisait les slogans scandés par les protestants pacifiques contre les régimes de Zine El-Abidine Ben Ali et Hosni Moubarak. En Libye, vous pouvez difficilement passer une demi-heure sans entendre les gens dire qu'ils vivent dans le pays le plus riche mais sont les plus pauvres. Le problème est tout autant d'actualité dans d'autres pays, comme la Syrie et le Bahreïn, où les protestations se poursuivent. D'un sujet de débat politique pointu, les problématiques que représente l'ITIE ont pris d'assaut les rues arabes et sont toujours au premier plan des préoccupation parmi le peuple.

UNE BONNE GOUVERNANCE - AU CŒUR DE LA VISION DU MONDE DES RÉVOLUTIONNAIRES

Traditionnellement, le Moyen-Orient a été considéré, à raison, comme coriace par les activistes de la transparence. Alors que deux tiers des réserves mondiales d'hydrocarbures sont sous clé dans quelques pays autour du Golfe, le secret est profondément institutionnalisé dans la plupart de ces pays. Mais voilà une image que le Printemps arabe pourrait bien égratigner de deux façons importantes.

Tout d'abord, l'Égypte présente un cas intéressant car, bien que les ressources naturelles n'y constituent pas une grande proportion du PIB ou des exportations, elles représentent néanmoins une part importante de l'économie politique du pays. Cela est vrai de la Tunisie, de la Syrie, du Soudan, du Yémen, du Maroc et pourrait l'être du Liban dans un avenir proche, en fonction de la taille des réserves gazières actuellement à un stade précoce d'exploration.

En Égypte, l'intérêt pour la transparence ne s'est pas manifesté seulement parmi les activistes de la société civile mais au sein même du secteur pétrolier. Des fonctionnaires du ministère du Pétrole et des responsables de sociétés privées considèrent que des instruments tels que l'ITIE aident à établir un ensemble de règles pour la nouvelle ère dans laquelle entrent leurs pays, et peut-être aussi à soulager un secteur qui est devenu profondément politisé en raison des ventes de carburant par l'Égypte à Israël. Deux candidats principaux aux élections présidentielles, Amr Moussa et Mohamed El Baradei, sont de par leur carrière des internationalistes confirmés, et probablement favorables à l'ITIE.

Ensuite, il y a le facteur de groupe de pairs et de contagion. Bien entendu, les économistes et politologues peuvent démêler toutes les différences et spécificités entre les différents pays arabes. Le PIB par habitant du Bahreïn est presque vingt fois celui du Yémen. Une femme bahreïni a deux fois plus de chances de travailler que son amie syrienne et la Syrienne, à son tour, a deux fois plus de chances d'être alphabétisée que son amie yéménite. Mais si ces différences "objectives" n'importaient pas lorsque les protestations se sont propagées d'un pays à l'autre, ou aux protestants lorsqu'ils risquèrent la mort en se découvrant la poitrine, littéralement, devant les mitrailleuses, il est peu probable qu'elles importent si et quand les révolutions permettront aux populations de penser à définir leur futur selon leurs propres rêves et aspirations.

En outre, cette passion de la rue trouve son écho dans l'intérêt des nouveaux décideurs. Les cadres supérieurs d'Agoco, la compagnie pétrolière nationale de Lybie basée à Benghazi, ont très tôt annoncé leur soutien aux rebelles et étaient disposés, quand je les ai rencontrés, à mettre l'accent sur l'importance qu'ils accordent à la bonne gouvernance. Il y a une véritable soif de rejoindre la communauté internationale dans le sens le plus complet, non seulement dans la forme, traités entre États et alliances géopolitiques, mais en substance, normes mondiales et meilleures pratiques. Si les révolutions étaient une question de "karama", dignité ou honneur, que les gens ordinaires estimaient avoir perdus dans leur relation avec les régimes autocratiques, ce karama s'applique également à la manière dont eux et leurs pays sont vus dans le monde. Tant de Tunisiens, Égyptiens et autres disent qu'ils veulent juste être capables de tenir la tête droite lorsqu'ils rencontrent des étrangers. On pourrait utiliser un jargon plus technique mais il est clair que la bonne gouvernance est au cœur de la vision du monde des révolutionnaires.

La transparence pourrait se propager à la façon d'un virus dans le monde arabe

Même dans le Golfe, il y a des fentes par lesquelles pourrait passer la lumière. En Arabie saoudite, par exemple, le nombre de citoyens masculins qui détiennent un portefeuille d'actions du marché local est supérieur à celui des États-Unis. Le secteur pétrochimique – qui dépend de Saudi Aramco pour les matières premières – rivalise avec le secteur bancaire pour la place du secteur connaissant le plus d'activité sur à la bourse de Riyadh. Les actionnaires, en d'autres mots, constituent un puissant électorat pour la transparence si l'on parvient à trouver comment les atteindre, d'autant plus prometteur qu'ils sont apolitiques au sens large et, par conséquent, moins menaçants pour le pouvoir.

Si l'Égypte et une Libye post-Kadhafi, étaient - imaginons - prêtes à se joindre à l'Irak et au Yémen dans la mise en œuvre de l'ITIE, nous pourrions atteindre des masses considérables. La transparence pourrait se propager à la façon d'un virus dans le monde arabe.

 

Johnny West dirige le bureau de consultance OpenOil et est conseiller pour le Programme des Nations unies pour le développement sur l'ITIE en Irak, et la gouvernance dans le secteur pétrolier au Moyen-Orient. Son livre, "Karama! Travels through the Arab Spring" (Karama! Voyages à travers le Printemps arabe) a paru au Royaume-Uni la semaine dernière. Découvrez-en davantage sur http://johnnywest.net.