Section 5 de la Partie 1 de la Norme ITIE 2023
Cette section présente le protocole visant à garantir l’engagement total, actif et efficace de la société civile dans le processus de l’ITIE.
1. Introduction
La participation de la société civile constitue un élément fondamental pour atteindre les objectifs de l’ITIE, et notamment le Principe 4 de l’ITIE, qui stipule qu’ « une compréhension publique des recettes et des dépenses publiques sur la durée est susceptible de contribuer au débat public et d’éclairer le choix d’options appropriées et réalistes favorisant le développement durable». La participation active de la société civile au processus de l’ITIE est essentielle pour assurer que la transparence créée par l’ITIE conduise à une redevabilité accrue. Un motif primordial de l’adoption de la Norme ITIE était le désir de produire des informations plus pertinentes, plus fiables et plus utilisables, et de mieux associer ces informations à des réformes plus générales dans la gouvernance du secteur extractif ou à la gestion de la comptabilité et des recettes publiques. La capacité des citoyens à travailler activement pour mettre à profit les informations générées par l’ITIE est donc une composante essentielle de la mise en œuvre de l’ITIE et de la participation de la société civile à l’ITIE.
La participation de la société civile au processus de l’ITIE est évaluée formellement à deux stades de la mise en œuvre de l’ITIE : dans le cadre de l’évaluation de l’adhésion à l’ITIE et au cours du processus de Validation. Il est également possible d’évaluer la participation de la société civile de manière ad hoc en réponse à des préoccupations particulières soulevées auprès du Conseil d’administration de l’ITIE sur la situation dans des pays de mise en œuvre spécifiques. Ce protocole définit les questions que le Conseil d’administration de l’ITIE (y compris les Comités du Conseil d’administration de l’ITIE) et les Validateurs devront prendre en considération dans l’évaluation du respect des dispositions relatives à la participation de la société civile (Exigence 1.3), ainsi que les types de preuves à utiliser pour répondre à ces questions. Tandis que les dispositions relatives à la participation de la société civile au processus de l’ITIE demeurent cohérentes à chaque étape de la mise en œuvre de l’ITIE, les éléments de preuve retenus par le Conseil d’administration de l’ITIE pour évaluer le respect de ces dispositions varient en fonction de la situation du pays, du stade de la mise en œuvre et de la disponibilité des informations. Il faut noter que les questions posées et les types de preuves suggérés qui sont définis dans les sections 2.1 à 2.5 ci-dessous ne constituent ni des dispositions, ni une liste exhaustive. Ce protocole fournit toutefois un cadre d’évaluation pour les dispositions liées à l’engagement de la société civile.
2. L’interprétation de l’ITIE concernant les dispositions relatives à la société civile
Pour les besoins de ce protocole, les références aux « représentants de la société civile » incluront les représentants de la société civile qui sont fortement impliqués dans le processus de l’ITIE, y compris (mais pas uniquement) les membres du groupe multipartite.
Les références au « processus de l’ITIE » incluent les activités concernant les préparatifs à l’adhésion à l’ITIE ; les réunions des groupes multipartites ; les réunions du collège des organisation de la société civile, y compris des interactions avec les représentants des groupes multipartites ; l’élaboration de Rapports de l’ITIE ; la soumission d’éléments ou l’analyse de Rapports de l’ITIE et la formulation d’avis concernant les activités de l’ITIE et la gouvernance des ressources naturelles.
Lors de l’évaluation des dispositions relatives à la société civile, le Conseil d’administration de l’ITIE et les Validateurs appliqueront les tests suivants :
2.1 Expression
Les représentants de la société civile sont en mesure de participer au débat public concernant le processus de l’ITIE et d’exprimer librement des opinions au sujet du processus de l’ITIE, sans contrainte, ni coercition, ni représailles.
Le Conseil d’administration de l’ITIE et les Validateurs considéreront la mesure dans laquelle :
- Les représentants de la société civile sont en mesure de parler librement du processus de l’ITIE en public, y compris par exemple au cours des réunions du groupe multipartite et d’événements tenus sous les auspices de l’ITIE (notamment la promulgation de Rapports de l’ITIE, de manifestations publiques, dans les médias, etc.)
- Les pratiques concrètes, y compris les opinions de diverses parties prenantes ou les preuves substantielles fournies par des tiers indépendants, indiquent qu’une autocensure ou qu’une restriction volontaire de la part des représentants de la société civile a été mise en place dans le cadre du processus de l’ITIE en raison de crainte de représailles, et si oui ou non ces obstacles ont affecté la diffusion d’informations par les représentants de la société civile et les commentaires publics sur le processus de l’ITIE.
2.2 Opération
Les représentants de la société civile sont en mesure d’agir librement dans le cadre du processus de l’ITIE.
Le Conseil d’administration de l’ITIE et les Validateurs examineront la mesure dans laquelle l’environnement juridique, réglementaire, administratif et effectif a affecté la capacité des représentants de la société civile à participer au processus de l’ITIE. Cela peut par exemple inclure :
- Des procédures juridiques ou administratives relatives à l’enregistrement des organisation de la société civile qui ont affecté négativement leur capacité à participer au processus de l’ITIE ; des restrictions juridiques ou administratives sur l’accès à des financements qui ont empêché des organisations de la société civile d’entreprendre des travaux liés au processus de l’ITIE ; des problèmes juridiques ou administratifs qui ont empêché des organisations de la société civile de tenir des réunions liées au processus de l’ITIE ; ou des obstacles juridiques ou administratifs à la diffusion d’informations et de commentaires publics sur le processus de l’ITIE, etc.
- Tout élément donnant à penser que les droits fondamentaux des représentants de la société civile ont été restreints dans le cadre de la mise en œuvre du processus de l’ITIE, ces restrictions pouvant par exemple affecter leur liberté d’expression ou de mouvement.
2.3 Association
Les représentants de la société civile ont la possibilité de communiquer et de coopérer les uns avec les autres concernant le processus de l’ITIE.
Le Conseil d’administration de l’ITIE et les Validateurs examineront la mesure dans laquelle :
- Les représentants de la société civile à un groupe multipartite pourraient chercher, sans subir de restrictions, à mettre à contribution d’autres organisations de la société civile ne siégeant pas au groupe multipartite, y compris en communiquant les positions de ces organisations de la société civile au groupe multipartite et en leur faisant connaître les résultats des délibérations du groupe multipartite.
- Les voies de communication officielles ou informelles n’ont pas été restreintes entre les représentants de la société civile au groupe multipartite et le collège de la société civile en général.
- Les représentants de la société civile au groupe multipartite n’ont pas été empêchés de s’engager dans une démarche de rayonnement auprès de la société civile en général, y compris dans le cadre de discussions au sujet de la représentation au groupe multipartite et du processus de l’ITIE.
2.4 Engagement
Les représentants de la société civile sont en mesure d’être pleinement, activement et efficacement engagés dans la conception, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation du processus de l’ITIE.
Le Conseil d’administration de l’ITIE et les Validateurs examineront la mesure dans laquelle :
- Les représentants de la société civile sont en mesure de contribuer pleinement au processus de l’ITIE et de l’alimenter. Cela peut par exemple inclure des preuves montrant que ces représentants apportent une contribution et font un plaidoyer en relation avec les principales délibérations du groupe multipartite sur des questions telles que les objectifs et activités du plan de travail ; le cadre du processus de déclaration de l’ITIE ; l’approbation des Rapports de l’ITIE ; l’auto-évaluation annuelle du processus de l’ITIE au moyen des rapports annuels d’activité ; la Validation, etc. D’autres éléments de preuve peuvent concerner la participation régulière de la société civile aux réunions du groupe multipartite, aux groupes de travail du groupe multipartite et à d’autres événements de l’ITIE, et le fait que les vues des organisations de la société civile sont prises en compte et documentées dans les comptes-rendus des réunions du groupe multipartite.
- Les représentants de la société civile estiment qu’ils ont une capacité suffisante de participer à l’ITIE. Les preuves à l’appui de cette thèse devront inclure la constatation que les contraintes techniques, financières ou autres affectant la capacité de participation de la société civile ont été prises en considération et que les plans formulés pour répondre à ces contraintes ont été convenus et/ou appliqués, notamment par l’offre d’un accès aux ressources ou au renforcement des capacités.
2.5 Accès aux processus décisionnels publics
Les représentants de la société civile sont en mesure de s’exprimer librement sur les questions de transparence et de gouvernance des ressources naturelles, et de veiller à ce que l’ITIE contribue au débat public.
Le Conseil d’administration de l’ITIE et les Validateurs examineront la mesure dans laquelle :
- Les représentants de la société civile sont en mesure d’utiliser le processus de l’ITIE en vue de promouvoir un débat public, par exemple au moyen d’événements publics, d’ateliers et de conférences organisés par la société civile ou bénéficiant de sa participation pour informer le public sur le processus de l’ITIE et ses résultats.
- Les représentants de la société civile sont en mesure de s’engager dans des activités et des débats sur la gouvernance des ressources naturelles, y compris par exemple par l’analyse et le plaidoyer sur les questions relatives aux ressources naturelles, l’utilisation de données de l’ITIE, l’interaction avec des médias, le développement d’outils pour communiquer les résultats des Rapports de l’ITIE, etc.
2.6 Documentation
En recueillant les éléments de preuve susmentionnés, il conviendra de tenir compte de la documentation disponible provenant du groupe multipartite et des organisations de la société civile qui engagées dans le processus de l’ITIE, ainsi que des résultats des consultations directes avec les parties prenantes concernées, y compris, mais sans s’y limiter, les membres du groupe multipartite. Pour des raisons contextuelles, le Conseil d’administration de l’ITIE examinera l’environnement général dans lequel opère l’ITIE en se référant par exemple à des indicateurs ou à d’autres types d’évaluations pertinents pour les questions abordées aux points 2.1 à 2.5 ci-dessus.
3. Restrictions ad hoc affectant les représentants de la société civile
3.1 Les allégations ou comptes-rendus ad hoc concernant des restrictions potentielles ou réelles frappant les représentants de la société civile dans les pays de mise en œuvre de l’l’ITIE devront en premier lieu être discutés et traités par le groupe multipartite, sous réserve de toute préoccupation relative à la sécurité qu’une partie affectée pourrait avoir concernant le fait de soulever telles questions au niveau national.
3.2 Par le biais de son Comité de Réponse rapide, le Conseil d’administration de l’ITIE peut être appelé à enquêter sur des cas particuliers et à se pencher sur des atteintes présumées aux Principes de l’ITIE et aux Exigences de l’ITIE, selon les besoins. Le Conseil d’administration de l’ITIE étudiera les demandes de ce type en tenant compte des faits de l’affaire, de la nécessité de maintenir les Principes de l’ITIE ainsi que le principe d’égalité de traitement entre les pays. En accord avec la Partie 2 de la Norme ITIE, « lorsque le Conseil d’administration de l’ITIE craint que l’adhésion aux Principes de l’ITIE ou des Exigences de l’ITIE soit compromise, il peut charger le Secrétariat international de l’ITIE de recueillir des informations sur la situation et de soumettre un rapport au Conseil d’administration de l’ITIE ». Lorsque des préoccupations sont exprimées concernant la participation de la société civile, le Conseil d’administration de l’ITIE s’efforcera, selon le cas, d’établir s’il existe un lien direct avec le processus de l’ITIE, notamment en (i) documentant les faits de l’affaire ; (ii) recueillant les points de vue des parties prenantes ; (iii) appliquant le test exposé aux points 2.1–2.5 ci-dessus.
3.3 En fonction des circonstances de l’affaire, y compris de la mesure dans laquelle on peut établir qu’il existe un lien direct entre les préoccupations exprimées et le processus de l’ITIE, le Conseil d’administration de l’ITIE envisagera une réponse appropriée. Cette réponse peut par exemple prendre la forme d’une lettre du/de la Président(e) de l’ITIE ou du Conseil d’administration de l’ITIE au gouvernement concerné ; de missions du Conseil d’administration de l’ITIE ou du Secrétariat international de l’ITIE dans le pays ; de la commande d’évaluations indépendantes ; de l’émission de déclarations du Conseil d’administration de l’ITIE ; d’un accord sur les mesures correctives à entreprendre, y compris le suivi de la mise en œuvre ; ou d’un appel à la Validation du respect des dispositions en question par un pays. En accord avec la Partie 2 de la Norme ITIE, « lorsqu’il est manifestement clair qu’un aspect significatif des Principes de l’ITIE et des Exigences de l’ITIE n’est pas respecté par un pays de mise en œuvre, le Conseil d’administration de l’ITIE suspendra ou radiera le pays ». Dans les cas où le Conseil d’administration de l’ITIE parvient à la conclusion que les préoccupations observées n’enfreignent pas une disposition ou ne sont pas suffisamment liées au processus de l’ITIE, il exercera sa discrétion pour prendre des mesures ou non, en s’attachant en priorité à maintenir les Principes de l’ITIE et à garantir l’égalité de traitement entre les pays.