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Un partisan optimiste

« J’ai passé toute ma vie en Afghanistan. Je pense que ce n’est pas un pays pauvre », affirme Mirwais Sarrah, coordonnateur national de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives d'Afghanistan (EITI). D’aucuns pourraient taxer M. Sarrah d’optimisme débordant pour une telle déclaration. Il est vrai qu'en 2013, l’Afghanistan se classait au 175erang de l’Indice de Développement humain qui mesure les revenus, l’éducation et l’espérance de vie. Depuis des décennies le pays est en proie à une série de conflits, autant avec des états étrangers qu'avec des tribus locales.

La question à mille milliards de dollars

Alors que tous les indicateurs montrent une population afghane en difficulté, les estimations des richesses naturelles du pays atteignent elles des niveaux hallucinants. Les ressources du sous-sol afghan ont étéestimées de un à trois mille milliards de dollars américains.Et c’est précisément à cette richesse que fait référence M. Sarrah lorsqu’il déclare que l’Afghanistan n’est pas un pays pauvre. Mais il prend toutefois pleinement la mesure des défis de développement auxquels est confronté son pays. Avant de rejoindre le Secrétariat national de l’ITIE en décembre dernier, il travaillait pour le PNUD, la Banque mondiale et le ministère des Finances.

M. Sarrah réalise bien que les industries extractives pourraient transformer le pays. Les activités des sociétés d’extraction peuvent générer rapidement d’importants revenus qui pourraient être réinvestis dans d’autres secteurs, comme l’agriculture, le transport, l’accès à l’eau et à l’éducation. « Ces recettes intérieures renforceraient notre souveraineté et notre capacité à définir les priorités nationales », indique M. Sarrah. En 2013, l'Afghanistan était le premier bénéficiaire mondial de l’aide officielle au développement.

« La transparence pourrait voir même améliorer la sécurité », poursuit-il. La plupart des combattants luttant contre le gouvernement sont des mercenaires professionnels, tributaires de la guerre pour leur survie. Un secteur de l’extraction bien géré créerait des emplois et des activités économiques, offrant ainsi une source de revenus alternative à ces jeunes hommes, ce qui contribuerait directement au renforcement de la paix et de la sécurité.

L'importance d'un bon maintien des registres

Comme c’est souvent le cas, apporter des modifications de fond implique aussi la mise en place d'un encadrement bureaucratique efficace. L’ITIE Afghanistan jouera ici un rôle important, contribuant notamment à identifier les faiblesses institutionnelles et formuler des recommandations. « Nous pouvons aider le gouvernement à élaborer une vision sur le long terme pour ce secteur et lui apporter un appui technique. » précise M. Sarrah.

L’absence de données précises et fiables pose un problème en matière de transparence de la gouvernance. Le ministère des Mines et du Pétrole ne dispose pas d’un système de données centralisées, ce qui fait qu’il est très difficile de rassembler les informations. Mais la gestion de données ne pose pas seulement des problèmes au gouvernement, mais aussi aux sociétés nationales, qui luttent elles aussi avec le bon maintien des registres. Pour y remédier, l’ITIE Afghanistan compte ainsi élaborer un système de comptabilité et de vérification à l’usage des sociétés participantes.

La lutte contre les pratiques illégales

Actuellement, dans le secteur minier afghan, tout ne se passe pas dans le respect absolu des règles établies. Dans la sphère politique, nombreuses sont les personnes mêlées à des activités illégales. M. Sarrah reconnaît que le changement prendra du temps : « Nous avons besoin de plus de temps pour parvenir à mettre en place un système standardisé » Fort heureusement, il dispose d’un fort soutien au sein du ministère des Finances, qui accueille le Secrétariat de l’ITIE. « Le ministre soutient activement l’initiative. Il m’a assuré qu’il souhaitait la mise en place d’une vraie ITIE ».

La mise en place d’une « vraie » ITIE consiste notamment à imposer la transparence des recettes, afin d’accroître la responsabilisation. « Nous comptons utiliser l’ITIE pour établir un suivi des procédures d’octroi de licences et surveiller les contrats passés entre le gouvernement et les sociétés. La société civile pourrait alors diffuser ces informations et la population pourrait demander des comptes au gouvernement. » explique M. Sarrah. Il semble convaincu de la nécessité d’accroître la transparence et la responsabilité, afin de s’assurer que les richesses de l’Afghanistan profitent aussi à la population démunie. « L’aspect le plus gratifiant de mon travail est de pouvoir observer des résultats concrets et essayer de faire avancer les choses ».