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L’ITIE ET PCQVP à 20 ans : Il est temps de passer à la vitesse supérieure, et non de lever le pied

La Directrice exécutive sortante de PCQVP partage son point de vue sur l’ITIE et PCQVP

Alors que je m’apprête à quitter mon poste de Directrice exécutive de Publiez ce que vous payez (PCQVP), je réfléchis également à la manière dont l’espace de gouvernance des ressources naturelles a changé au cours des six dernières années. Tout au long de mon mandat à PCQVP, je suis restée constamment engagée auprès de l’ITIE, sous une forme ou sous une autre, et je peux dire sans me tromper que l’engagement de la société civile auprès de l’ITIE et la réponse des autres collèges à l’ITIE n’ont jamais été aussi forts. Cela ne signifie pas que nous sommes toujours d’accord, mais nous concentrons de plus en plus les discussions sur les domaines de la gouvernance des ressources qui ont une réelle pertinence sur le terrain, et nous le faisons de manière constructive.

Dans quel autre contexte que celui de l’ITIE, les entreprises, les gouvernements et, surtout, la société civile peuvent-ils se réunir pour discuter sur un pied d’égalité de la gestion équitable et responsable des ressources naturelles ? Alors que deux années passées dans l’impossibilité de se rencontrer en personne, de prendre le temps d’aborder des questions délicates au cours d’un dîner ou en fin de soirée au bar de l’hôtel, aient laissé des traces, l’esprit de coopération est toujours bien vivant au sein des collèges de l’ITIE. Et il le faut ! Ensemble, nous avons des problèmes extrêmement complexes et difficiles à résoudre pour assurer une meilleure situation aux citoyens des pays riches en ressources.

L’ITIE et PCQVP célèbrent tous deux leur 20e anniversaire cette année – et il y a de quoi être fiers. Nous avons réussi à nous réunir en moyenne trois fois par an lors des réunions du Conseil d’administration de l’ITIE, avec les entreprises pétrolières, gazières et minières et les gouvernements, afin de consolider une norme toujours plus sophistiquée et solide pour la bonne gouvernance des ressources extractives. Ce n’est pas une mince affaire – imaginez les dirigeants de Shell et de Chevron assis avec des militants de terrain du Nigeria aux Philippines et des représentants gouvernementaux de plus de 50 pays mettant en œuvre l’ITIE. Au niveau des pays, les organisations membres de PCQVP sont activement engagées par le biais de groupes multipartites pour assurer la mise en œuvre de la norme en évolution. En collaborant aux niveaux mondial et national, les collèges ont veillé à ce que l’ITIE renforce son approche sur des questions importantes, telles que la transparence des contrats, la déclaration au niveau des projets, la transparence de la propriété effective et la mise en œuvre des registres de propriété.

Plus récemment, le Conseil d’administration a reconnu que les entreprises soutenant l’ITIE devaient « joindre le geste à la parole », c’est-à-dire promouvoir, plutôt que de saper des règles qui s’alignent sur les objectifs fondamentaux de l’Initiative en matière de transparence et de lutte contre la corruption. Il s’agit d’un pas en avant important qui a été franchi à la suite d’une plainte déposée par PCQVP États-Unis et d’un excellent exemple du rôle crucial de la société civile en tant qu’organe de surveillance, tenant l’ITIE responsable devant elle-même. Cependant, il est à craindre que les entreprises de l’ITIE puissent continuer à faire pression contre la Norme ou les Principes de l’ITIE sans trop de conséquences, même si elles siègent au Conseil d’administration de l’Initiative. J’espère que la prochaine fois qu’une entreprise soutenant l’ITIE agira de manière contraire à l’esprit de l’ITIE, elle sera rapidement retirée du Conseil d’administration. L’ITIE ne peut tout simplement pas se permettre d’avoir des entreprises réfractaires dans des rôles de direction au sein de son organe de gouvernance.

Je n’ai pas assisté à une seule réunion du Conseil d’administration de l’ITIE qui n’ait pas inclus une discussion animée sur l’espace civique. La Norme ITIE reconnaît que la société civile doit pouvoir participer librement et sans représailles à la mise en œuvre de l’ITIE, notamment en examinant les lois, les règlementations et les règles administratives pertinentes relatives à la gouvernance des ressources naturelles. Pourtant, à maintes reprises, les groupes de la société civile se heurtent  à de sévères réticences de la part des autorités dans de nombreux pays mettant en œuvre l’ITIE, notamment lorsqu’ils utilisent les données ITIE comme preuve malversations potentielles dans le secteur. Et de manière inquiétante, de temps à autre, le Conseil d’administration de l’ITIE rencontre des difficultés à appliquer ses propres règles de suspension – y compris la suspension de pays dont il a été constaté qu’ils avaient restreint l’espace civique autour du processus ITIE. J’espère qu’à l’avenir, le Conseil d’administration reconnaîtra systématiquement la nécessité de suivre ses propres règles en matière de suspension, afin d’assurer que l’ITIE ne devienne pas un exercice consistant à cocher des cases par des régimes autocratiques, sans aucun impact sur la mise en place de réformes politiques et de gouvernance significatives dans le secteur extractif. Et la société civile a un rôle essentiel à jouer à cet égard, la richesse ou les informations qui sont mises en lumière par les processus de Validation sont extrêmement utile pour demander des comptes aux puissants. Nous avons milité pour cela, faisons-en bon usage !

Dans les prochaines années, la transition énergétique aura un impact profond sur le secteur extractif, car le secteur de l’énergie s’éloigne des combustibles fossiles. Chez PCQVP, nous l’avons reconnu en adoptant la première position mondiale du mouvement sur la transition énergétique et en appelant à un processus de transition équitable, transparent et responsable. L’ITIE a également un rôle important à jouer pour aider les pays riches en ressources à s’adapter à la nouvelle réalité et à veiller à ce que l’essor de la demande de minéraux de transition n’entraîne pas une nouvelle vague de malédiction des ressources. En tant qu’initiative de transparence, l’ITIE doit également tirer parti de son expertise pour exposer et traiter les risques financiers liés au climat des projets pétroliers, gaziers et charbonniers existants et prévus.

Il y a toujours eu des inquiétudes d’autres collèges estimant que l’ITIE évolue trop rapidement, que les pays rencontrent des difficultés à mettre en œuvre les exigences existantes, que les ressources sont trop limitées. Je comprends ces réserves, mais ce n’est pas le moment de reculer devant les obstacles qui nous attendent. Les défis en évolution de ce secteur n’attendent personne – nous avons besoin d’une direction plus audacieuse pour une meilleure gouvernance des ressources naturelles. La crise climatique est un appel à l’action pour toutes les parties prenantes investies dans l’ITIE, y compris les bailleurs de fonds comme la Banque mondiale, pour qu’elles passent à la vitesse supérieure, et non lèvent le pied. Car en définitive nous nous engageons tous dans l’ITIE, pas simplement pour échanger et parvenir à un consensus, mais pour assurer un monde meilleur aux citoyens des pays riches en ressources.

Author(s)
Elisa Peter
Keywords
Civil society